« C’est bien plus difficile d’honorer la mémoire des anonymes que celles des personnes célèbres. La construction historique est consacrée à la mémoire de ceux qui n’ont pas de nom. » Walter Benjamin
"Mémoires blessées" fait état de plusieurs mémoires traumatiques en quête de reconnaissance : la subalternité des poilus de la Grande Guerre, le génocide des Arméniens, l’Espagne franquiste et la guerre civile, la destruction des Juifs d’Europe, Sétif, les harkis, les dictatures chilienne et argentine, mais aussi le décès d’ouvriers lié à l’amiante, le vécu difficile de l’émigration… Des histoires qui a priori n’ont rien à voir entre elles, mais qui sont somme toute liées par une expérience similaire : une souffrance tue, ou non audible, qui se doit d’être révélée et analysée par l’historien pour rendre le passé intelligible.
En ce qui concerne le cas singulier de la destruction des Juifs d’Europe sous le nazisme, il s’agit de ne pas tomber dans le double écueil de la sacralisation et de la banalisation. « Avec la sacralisation, il n’y aurait plus d’analyse possible, toute quête d’intelligibilité serait vaine à jamais ; mais avec la banalisation, c’est le relativisme et ses impasses qui rendraient alors illusoire toute approche un tant soit peu critique et responsable. »
L’auteur considère que « les traumatismes des uns concernent aussi les autres, et inversement. » Il porte ce regard de l’historien, attentif aux témoignages qui remontent jusqu’à aujourd’hui, il est celui qui écoute « la singularité de drames humains particuliers », et qui tient compte également de la « dynamique collective » pour prévenir du risque du retour de la barbarie. « Et ce risque, qui nous concerne tous, relève bien d’une dimension globale et universelle. »
Mais si la reconnaissance des mémoires blessées est n